Votre rapport à la nature ?
J'aime la nature, la biodiversité, son calme, contempler les écosystèmes millénaires. Pour me connecter à elle, j'affectionne tout particulièrement marcher autour du Lac de Villeneuve de la Raho, village des Pyrénées-Orientales où jai grandi, au pied du Pic du Canigou. L'endroit est paisible, la lumière si particulière, la végétation luxuriante, ce lac reflète la splendeur du Canigou et sent bon le mimosa au mois de Février, une source d'inspiration pour le nom de mon entreprise. Depuis 1 an, j'ai quitté Paris pour m'installer entre Avignon et Aix en Provence. Après 13 ans à Paris, j'ai désormais le privilège de vivre entouré d'agriculture et de biodiversité, même si je continue de venir à Paris toutes les semaines. La nature, la biodiversité et l'agriculture sont nos biens communs les plus chers.
Votre geste au quotidien pour préserver la nature?
Réduire mon empreinte carbone, celui de ma famille et sensibiliser mon entourage pour qu'il en fasse de même. Me concernant, cela passe par privilégier une alimentation locale et de saison, réduire ma consommation de viande et de produits laitiers, trier et recycler, éviter les transports aériens (cela fait 3 ans que je n'ai pas pris l'avion). Il est important, collectivement, que nous allions vers le "moins mais mieux" dans tous les domaines.
Une expérience marquante qui vous a fait prendre conscience de l’intérêt d'en prendre soin ?
Plutôt qu'une expérience : comme des millions de Français je pense avoir été sensibilisé et éduqué à cette prise de conscience alors que je n'étais qu'un enfant grâce à l'émission Ushuaïa.
De plus, petit-fils d'agriculteur, j'ai toujours intimement nourri une admiration pour ce secteur et le vivant. Au-delà de l'exigence de son métier, de l'humilité nécessaire face à la nature, l'environnement, les écosystèmes millénaires, mon grand-père m'a aussi transmis son amour pour la terre et le respect des hommes et des femmes qui se lèvent, tous les matins, pour nous nourrir.
En quoi la nature est-elle une source d’inspiration pour vous, dans votre rôle de dirigeant d’entreprise ?
C'est une source d'inspiration en matière de résilience, d'humilité et d'esthétique. De résilience car ces écosystèmes ont tout vécu, tout traversé en termes de conditions, et nous entourent même s'ils sont aujourd'hui menacés par nos excès. L'humilité, comment ne pas l'être face à la richesse, la complexité et la puissance de la biodiversité. La nature occupait notre planète avant nous et continuera de l'habiter après nous si toutefois il devait y avoir un avenir sans humanité. Résilience et humilité sont deux qualités indispensables pour des entrepreneurs engagés dans l'impact et voulant fédérer autour d'une vision, d'une mission, d'enjeux. Enfin, l'esthétique, le beau de la complexité de la nature me rend admiratif. Je m'en inspire pour construire un univers très fort autour de MiiMOSA et de sa thématique.
Vos héros ou héroïnes concernant la préservation de la nature ?
De manière évidente, les agriculteurs. Injustement pointés du doigts sur ce sujet, les agriculteurs sont en passe de devenir les premiers soldats du climat. A travers la préservation de la qualité de l’eau, le stockage de carbone, la protection du paysage et de la biodiversité, la croissance des énergies renouvelables, les agriculteurs du monde contribuent à restaurer ou maintenir des écosystèmes dont l’humanité tire des bénéfices.
Le rôle à jouer par les entreprises pour relever les grands défis environnementaux ?
Leur rôle et responsabilité sont déterminants. Elles doivent s'engager, être responsables, relocaliser au maximum, sortir de la tyrannie de la rentabilité financière court-termiste et intégrer les résultats extra-financiers, en somme se transformer pour être à la hauteur des enjeux de notre siècle et accompagner la transition de nos sociétés vers une économie régénératrice. Les pouvoirs publics, la soi-disante puissance publique et politique se révèle être en réalité impuissante. Le meilleur exemple est la Conférence des Parties (COP). Depuis la COP de Rio en 1992, chaque année doit être la plus importante or elles sont stériles et ne servent qu'à médiatiser les catastrophes. Ainsi, les grands changements seront avant tout impulsées voir imposées par la société civile et les entreprises.
Etes-vous plutôt optimiste ou plutôt pessimiste sur la capacité des entreprises à relever les grands enjeux environnementaux dans les années à venir ?
Oui, je suis confiant car c'est le (bon) sens de l'histoire et ce que je vis depuis quelques années avec MiiMOSA me rassure. En 2018, nous avons entamé une stratégie de mobilisation d'acteurs de l'agroalimentaire mais pas que. Aujourd'hui, plus de 20 marques s'engagent à travers MiiMOSA, comme L'Oréal, Danone, Carrefour, Bledina et bien d'autres afin d'accompagner la transition de leurs filières d'approvisionnement. Aujourd'hui, l'intérêt pour MiiMOSA dépasse même l'agroalimentaire puisque nous sommes sollicités par des acteurs non directement connectés à l'agriculture (immobilier, transport, télécommunication, énergie), ces entreprises ayant compris que l'agriculture est au coeur des principaux défis auxquels nous faisons face.
La principale imperfection de votre entreprise concernant l’environnement ?
Personne n'est parfait, mais suite à un récent bilan (que nous faisons chaque année) il s'avère que MiiMOSA émet 67 % de CO2 de moins qu'une entreprise de son secteur et de sa taille (45 collaborateurs). Un des axes d'amélioration, c'est clairement notre utilisation du numérique (énergivore), mais un plan d'action est en cours pour tendre vers des partenariats locaux et responsables.
Une transformation réalisée par votre entreprise pour produire mieux (en étant plus respectueuse de la nature) ?
Certifiés B-Corp, nous sommes engagés dans une trajectoire de progrès permanents.
L’action engagée par votre entreprise en faveur de l'environnement, dont vous êtes le plus fier ?
Notre action au quotidien :) En 6 ans, MiiMOSA a accompagné près de 5 000 projets de transition agricole et alimentaire pour 70m€ de financement dont 30m€ en 2021 ! L'agriculture étant au coeur de tous les défis (alimentaires, environnementaux, climatiques, sanitaires et énergétiques), je suis fier de notre impact à la fois social et environnemental.
Les bénéfices pour votre entreprise d’agir positivement pour la nature ?
Sans nature et biodiversité, il n'y a pas d'agriculture et sans agriculture il n'y a pas de vie. Cela peut paraitre trivial, mais c'est tellement important de le rappeler car beaucoup l'oublie.
Sur MiiMOSA, tous les projets que nous accompagnons sont sélectionnés sur la base de critères financiers et extra-financiers pour nous assurer de la bonne trajectoire pour notre avenir commun et la planète. C'est une immense responsabilité, nous sommes un tiers de confiance pour notre communauté de 400 000 membres qui finance nos projets.
Le don de la nature que vous voudriez avoir ?
Le don d'ubiquité, sans hésiter ! Etant très actif et passionné, je suis à la fois frustré de ne pas pouvoir aller plus vite dans mon quotidien professionnel mais aussi de ne pas passer plus de temps avec les gens que j'aime. Néanmoins, cette frustration est saine, je pense que c'est l'apanage des entrepreneurs, le côté "toujours plus".
Un conseil pour encourager les entreprises à s’engager plus massivement pour la nature ?
Nous sommes à l'aube d'une réelle révolution de la consommation. Les citoyens que nous sommes veulent et voudront du sens, de la transparence et de l'impact. Dans les prochaines années, chaque jour, à travers leurs actes de consommation, les femmes et les hommes feront le choix d'un monde, d'une société, d'une justice, d'un commerce plus équitable et plus juste dans lequel ils veulent vivre. Les entreprises doivent s'engager au service du social, de l'environnemental et de l'urgence climatique, c'est une question de survie pour elles, nous passons enfin d'une ère du marketing de l'offre au marketing de la preuve.
Un dirigeant à découvrir dans la prochaine édition de ce portrait ?
Romain RAFFARD, fondateur de Bergamotte. L'industrie de la fleur n'est pas un secteur évident. Pourtant, depuis 2016, Bergamotte a mis en place une réelle "stratégie responsable" en matière d'approvisionnement, de suivi carbone.